Les noms des rues dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire ont pris une tournure résolument plus locale ces dernières semaines, alors que des noms africains ont remplacé ceux d’origine française.
Par exemple, la route reliant l’aéroport au centre-ville d’Abidjan ne porte plus le nom de l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing, mais celui de Félix Houphouët-Boigny, l’homme qui a dirigé la Côte d’Ivoire après son indépendance de la France en 1960.
« Les anciens noms n’étaient pas nécessairement utilisés par notre population », a déclaré Alphonse N’Guessan, le responsable de l’urbanisme chargé du projet, à l’agence de presse AFP.
Un nom « doit refléter notre histoire, notre culture », a-t-il ajouté.
La France, qui a autrefois exercé une importante présence coloniale en Afrique, voit plusieurs de ses anciennes colonies en Afrique de l’Ouest prendre leurs distances de Paris. Le Niger et le Mali ont également changé les noms de leurs rues pour se débarrasser de l’héritage colonial français.
Cependant, alors que des pays comme le Niger, le Burkina Faso et le Mali ont rompu leurs liens avec la France après des coups d’État militaires, la Côte d’Ivoire, sous domination française de 1893 à 1960, reste un allié régional de son ancien colonisateur.
Objectif à long terme
La Côte d’Ivoire a simplement « décidé de moderniser son système » de dénomination des rues, a expliqué N’Guessan.
L’opération, qui coûte 17 millions de dollars, vise à mettre « nos systèmes de circulation et de localisation aux normes internationales », a-t-il précisé.
Bien que le processus de re-nommage des rues à Abidjan ait commencé en 2021, ce n’est que depuis mars que les panneaux avec les nouveaux noms ont été installés dans la ville.
Environ 15 autres villes du pays verront également leurs noms de rues modifiés, avec un processus national qui devrait être achevé d’ici 2030.
Les nouveaux noms rendent hommage à des politiciens, scientifiques, artistes, athlètes ivoiriens ou à des concepts, et sont choisis en consultation avec des groupes de la société civile ou des chefs traditionnels locaux, selon N’Guessan.
Ainsi, le boulevard de Marseille, nommé d’après la ville portuaire du sud de la France, est désormais le boulevard Philippe Yacé, en hommage au premier président de l’Assemblée nationale.
Noms de révolutionnaires
Et le boulevard de France porte désormais le nom de la première Première Dame du pays, Marie-Thérèse Houphouët-Boigny.
« Il est important pour les Africains de s’identifier au développement de la ville », en particulier avec une « population de plus en plus jeune », a indiqué Wayiribe Ismail Ouattara, urbaniste.
Un jeune passant devant une rue nommée d’après un gouverneur colonial « n’aura pas le même sentiment que quelqu’un qui a vécu la colonisation », a-t-il ajouté.
Environ 75 % de la population ivoirienne a moins de 35 ans. Cette initiative a été largement saluée par les habitants d’Abidjan.
« Les noms des rues en Côte d’Ivoire devraient appartenir à des révolutionnaires ivoiriens, des politiciens ivoiriens », afin que « dans le futur, nous puissions expliquer à nos enfants qui est qui », explique Franck Hervé Mansou, un technicien de 31 ans.
Jean Bruce Gneple, un vendeur, a approuvé. « Le président Félix Houphouët-Boigny était et restera dans la mémoire de tous les Ivoiriens comme le premier homme de la Côte d’Ivoire, donc c’est un hommage à lui, et nous en sommes également fiers », a-t-il affirmé.
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