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Pour une équité véritable, au-delà de la journée internationale des droits des femmes ( Tribune collective)

Le plaidoyer de Khadidjatou Toro BALDE, étudiante en droit et en psycho-criminologie à l’Université Grenoble Alpes.

Il faudra bien obtenir un jour la suppression totale du patriarcat ! Le chemin est certes encore long et rien ne se fera jamais tout seul, mais tout doit commencer par une prise de conscience collective, par une acceptation des un(e)s et des autres, par une valorisation de chaque être humain à part égale. Les gouvernements ne peuvent pas s’en occuper tout seuls, les politiques qui font des promesses bancales encore moins. Cela doit venir de chacun de nous, cela doit commencer dans nos familles, dans l’éducation que nous inculquons à nos enfants.  

Expliquer à chaque enfant la place qu’il pourrait occuper dans ce monde, les choix qu’il pourrait faire, sans tenir compte de son sexe, faisons en sorte que ce soit une évidence.  

Expliquer aux garçons qu’ils ne sont pas forcément meilleurs que leurs sœurs, qu’ils ont exactement les mêmes pouvoirs, la même valeur que toute autre fille.  

En Afrique, cela semble encore quelque peu difficile puisque l’éducation est elle-même à la source du problème : les corvées ménagères à la fille, les études et la rêverie au garçon. L’un pourra devenir ingénieur ou même médecin, l’autre assurera l’intendance familiale. Un monde sans choix, sans vraie richesse : celle de l’autre.

La fille elle, si elle est un peu chanceuse, peut intégrer l’école mais seulement jusqu’au baccalauréat puisqu’à ce moment-là elle aura déjà l’âge de se marier, elle devra donc s’y consacrer pleinement à ce mariage qu’elle le veuille ou non. Elle n’est pas obligée d’être bien à l’école car de toute façon elle sera une épouse. Elle sera dirigée par son cher époux qui sera bien évidemment le maître et tuteur, tout comme l’était son père pour sa mère. En gros : père, frère, mari, oncle, vont-ils encore longtemps être ceux à qui la femme doit obéir ?  Elle dont le cerveau est assez grand pour réfléchir et agir, au même titre que l’homme . Seul un homme saurait prendre les bonnes décisions, lui a-t-on si souvent dit ? Rien n’est moins vrai…  

Cette culture dépassée fait référence à la religion, aux coutumes, aux anciennes relations ayant fonctionné ainsi : ta mère a vécu ainsi toute sa vie et cela ne l’a pas tué, tout comme ta grand-mère d’ailleurs.

Est-ce bien cela l’esprit de famille et l’honneur de la famille ?  

Mais est ce que nos mères et nos grand-mères étaient vraiment heureuses ?

Peut-être que oui, mais rien n’est moins certain aussi ! Elles se sont plus sûrement juste faites à l’idée que tel était leur destin. Et la transmission primitive se fait de génération en génération, car ainsi devraient se passer les choses depuis des lustres. “Les femmes ne pourront jamais être égales aux hommes, ma fille”. Une fois encore : rien n’est moins vrai …

Mais qui parle d’égalité ici ? Qui en demande autant ? L’égalité, la vraie, ne sera jamais possible puisque les hommes et les femmes n’ont pas en soi les mêmes besoins. On n’en demande donc pas autant. Et d’ailleurs on n’a pas besoin de cette égalité. Ce serait comme exiger une miche de pain pour quelqu’un qui a besoin en réalité d’une boulangerie. A besoin différent, peut-on alors vouloir la même chose ? Peut être pas, mais les mêmes droits : rien n’est plus sûr !

Ce que nous voulons vraiment, ce pourquoi nous nous battons tous les jours, c’est l’ÉQUITÉ : Identifier les besoins de chacun et s’atteler à les satisfaire. Nous voulons les mêmes opportunités que les hommes tout en nous laissant la chance de les saisir ou non. Nous voulons les mêmes conditions de travail, les mêmes salaires. Nous voulons et nous exigeons le respect dû à chaque être humain. Nous voulons être considérer juste comme un être humain avant même d’être une femme. Nous avons un cerveau, et nous avons la capacité de nous en servir. L’intelligence ne vient pas de l’école, loin de là. Donc nous ne voulons plus être traités de déracinées et de vendus, lorsque nous ouvrons la bouche et défendons ce que nous considérons comme étant fondamentales, et tout cela parce que nous avons eu l’audace inexcusable d’être nées femmes. Nous voulons juste être écoutées, entendues. Nous ne voulons pas faire pareil que les hommes (et c’est parfois une chance) nous voulons simplement faire différemment et pourquoi pas mieux dans certains domaines.  

C’est seulement à ce moment-là qu’on arrêtera de revendiquer, de lutter. A ce moment-là, nous n’aurons plus besoin d’une journée internationale des droits de la femme; nous n’aurons plus besoin d’un mois dédié à la femme. Nous nous sentirons libres, non pas parce que nous avons obtenu ce qui nous est dû mais parce que nous aurons la chance de vivre selon nos propres choix, sans stéréotype aucun. Nous aurons le pouvoir de décider de ce que nous voulons vraiment et de façonner ainsi notre vie à l’image de nos souhaits, sans avoir peur d’un quelconque jugement.  

Pour cela, il faut y travailler dès maintenant : chasser les inégalités, le sexisme. Il faut expliquer à nos proches ce que c’est que le sexisme du quotidien qui dure 364 jours, en dehors de la journée du droit des femmes. Contre ce fléau. Le sexisme, ce n’est pas seulement une situation extrême, c’est un quotidien misérable, celui où on demande à notre fille de débarrasser la table alors que le garçon lui, peut aller regarder le foot au salon.  

C’est lorsqu’au lieu d’éduquer les garçons à respecter le corps de chaque femme peu importe comment elle est vêtue, on préfère demander à notre fille de bien se couvrir avant de sortir pour ne pas inciter les pulsions des garçons à commettre un viol. Le sexisme ordinaire c’est lorsqu’on dit à la femme qu’elle n’est bonne que pour faire des bambins et des repas chauds, sans oublier les tâches ménagères bien sûr. Qu’au plus, elle peut devenir comptable car cela lui laisserait encore le temps de s’occuper de sa famille, de son foyer.  Comme si la responsabilité de ces tâches ne lui incombait qu’à elle. Le sexisme c’est lorsque dans un restaurant on tend l’addition à l’homme au lieu de là mettre au milieu parce qu’on considère que c’est forcément l’homme qui invite. Tous ces stéréotypes réduisent de plus en plus la valeur de la femme et ce de façon ordinaire.  

Chaque être humain, chaque femme devrait avoir le droit de vouloir, le droit de choisir quelle vie elle veut mener. Elle devrait avoir la liberté de ses choix sans avoir à s’inquiéter de ce que penserait la société. ‘’Si elle travaille beaucoup, c’est forcément une mauvaise mère. Si elle préfère rester à la maison pour s’occuper de sa famille, elle est forcément soumise et donc absolument pas épanouie’’  

On peut s’épanouir dans de si petites choses, l’important est de choisir librement ces petites choses qui nous font plaisir et qui nous rendent heureuses. Chaque femme a droit de regard, droit de cité et d’action dans la société à laquelle elle contribue, sans être représentée par un homme. Le plus important n’est pas ce que nous devons à l’autre, même pas ce que nous nous devons à nous même. Le plus important, et je le dis avec toute ma conviction de femme, c’est qui nous voulons vraiment être. C’est quelle trace nous voulons laisser dans ce monde. Alors tâchons juste d’être humain, libre et épanoui !

L’analyse de Amadou BAH, diplômé de Sciences Po Grenoble.

Belle idée d’une journée internationale des droits de la femme qui remonte déjà à 1910.  Le 08 mars représente une journée de combat pour l’égalité des sexes mais aussi pour la justice et la liberté.  Valeurs qui ne peuvent s’exprimer que dans un État de droit.

Le but était de mobiliser les femmes en lien avec les organisations ouvrières et d’exiger l’indépendance économique des femmes.  

Cette année, j’aimerais entendre des chiffres différents de ceux que nous connaissons d’habitude. Pourtant, cette fois encore, les inégalités et les discriminations persistent, dans les décisions pas toujours partagées des couples d’abord, dans l’emploi et les salaires bien sûr, comme dans le partage des tâches domestiques.  

Ces inégalités demeurent aussi dans l’accès aux postes à responsabilité et aux fonctions de décision, dans toutes les sphères de la société. D’autres phénomènes inquiétants se renforcent, et je pense notamment à la précarité au féminin, qui ne cesse de croître.  

Dans un rapport mondial particulièrement fouillé, l’ONU vient tout juste de pointer l’échec collectif des États dans l’avancement de la situation des femmes, et la lenteur révoltante des progrès.  

Les mots sont durs et le constat est sévère. Quand est-ce que les pays du monde et particulièrement mon pays la République de Guinée, agiront sérieusement pour créer des conditions où chacune et chacun, quel que soit son sexe ou son orientation sexuelle, pourra faire ses propres choix ? 

Pourra être maître ou maîtresse de son destin ?  

Cela signifie choisir librement son métier, ses loisirs, sans subir le poids des assignations et des stéréotypes sexistes. Cela signifie de choisir librement de s’engager dans la vie associative, citoyenne, et dans la vie politique.  

Pour cette égalité, Je rêve que des actions fortes soient portées par les États et leurs administrations dans les domaines de la petite enfance, de la jeunesse, du sport et de la culture pour que ce soit des vecteurs d’émancipation pour les filles comme pour les garçons.  

Stendhal disait que : « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation, et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain »  

Comment alors parler de droit, sans penser aux femmes qui luttent pour l’égalité des droits ?  Peut-on prétendre à l’universalité des droits de l’Homme et faire abstraction des droits des femmes alors qu’elles constituent plus de la moitié de l’humanité ?

 La place des femmes est une place de choix, elles doivent intégrer et bénéficier des mêmes avantages que les hommes sans qu’il soit besoin même d’en parler !   

La lutte pour l’égalité ou l’équité est un enjeu de mobilisation et de remobilisation ; elle commence dans  chaque famille : socialisation et éducation, respect mutuel et de chacun, sans hiérarchie autre que celle de l’espérance d’un avenir meilleur pour chacune et chacun.  

Malgré le progrès et l’évolution des conditions de la femme dans un certain nombre de pays, il faut admettre que le monde est loin de garantir l’égalité ou même un semblant d’égalité entre les femmes et les hommes, quand la soumission des femmes est la règle et l’émancipation l’exception face à l’exploitation, le patriarcat et la violence de toute nature. L’immense terreur qui règne en Afghanistan est une souffrance pour chaque homme digne de ce nom.

Le capitalisme, l’ultra libéralisme et la mondialisation ont plutôt favorisé un retour en arrière dans les rapports sociaux, une remise en question des acquis, une marchandisation de tout à l’échelle planétaire. Et en prime nous avons la triste vision des intégrismes religieux qui ne servent qu’à mieux contrôler et garder les femmes dans un état de dépendance et de soumission.  

L’acquisition d’un certain nombre de droits et l’émancipation des femmes dans un certain nombre de pays sont les résultats des luttes acharnées, des combats autonomes et du mouvement de libération des femmes au cours des dernières décennies. La pleine conquête de l’autonomie civile, la contraception, le droit à l’avortement, ou la présence sur la scène politique sont aujourd’hui des droits fondamentaux qu’il faut encore trop souvent défendre et conquérir ici et là continuellement.  

Ces droits ont fait évoluer un ordre social établi depuis des siècles. Ils ont bouleversé la famille et la société patriarcale. Ils ont touché en réalité le cœur du pouvoir de l’homme tout en ouvrant la voie pour combattre les autres discriminations. Ceci avec le concours de trop peu d’hommes …

Alors quels sont les obstacles ?  

Certes l’histoire, le contexte et les besoins diffèrent d’un pays à l’autre, d’un continent à l’autre, mais se mettre en marche pour plus d’égalité doit être une ardente obligation pour tous !  

Comment peut-on avancer dans ce XXI° siècle avec des projets déjà existants ?  

Des millions de femmes sont à l’œuvre chaque jour en Europe, en Afrique, en Amérique, en Océanie et en Asie pour refuser l’ordre établi, pour crier leur rage après des siècles d’oppression, d’humiliation, de lapidation et face à la violence familiale et sociale.  

En Afrique sub-saharienne, une statistique dit tout de leurs places vitales : les femmes et les filles consacrent 40 milliards d’heures par an, soit 6h par jour à la collecte de l’eau, soit l’équivalent d’une année de travail en France selon le PNUD, l’OMS et l’UNICEF.

Selon l’Unicef également 6 femmes par minute sont victimes de mutilations génitales dans le monde et 129 millions de filles n’ont pas accès à l’école.

Comment peuvent-elles avoir une bonne éducation dans les territoires ruraux, voire dans certaines grandes villes ?  

Le chemin à parcourir pour l’égalité est encore long, il va au-delà de la parité ou de mesures correctrices. C’est une entreprise de civilisation, bienveillante et obstinée, bien au-delà d’un simple objectif politique. Les inégalités et les discriminations se nourrissent des préjugés et des stéréotypes hérités de nos cultures et de nos croyances.

J’ose croire qu’une bonne prise de conscience nous aiderait à admettre qu’il n’y a de bonheur que dans l’égalité avec nos sœurs. Considérer les femmes ce n’est pas effacer les hommes, c’est seulement donner aux femmes leur juste place. La bataille pour l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes, se fait dès la naissance. Pour que de nouveaux comportements se construisent sans discrimination sexiste ni violence, il faut faire vivre une culture de l’égalité et du respect mutuel dès la naissance. Il faudrait investir en faveur des femmes, mettre en œuvre un financement tenant compte du genre.

Dans la sphère familiale tout le travail invisible et/ou dévalorisé, domestique, reproductif, éducatif, est assumé à majorité écrasante par les femmes. Cette idée selon laquelle les femmes seraient destinées naturellement aux tâches domestiques et au soin des autres, justifie leur surexploitation injuste et violente. Ce sexisme sert le système patriarcal et capitaliste partout dans le monde et particulièrement en Afrique et spécialement en Guinée.

Dans le monde, lorsque Trump ou Bolsonaro ont été au pouvoir, ce sont les droits des femmes et des immigrés qui ont été attaqués en premier. En Pologne ou en Russie, au nom d’une vision traditionaliste de la famille, le droit à l’avortement a été réduit.  

Il faut créer une solidarité féministe et revendiquer ensemble notre droit individuel fondamental à une existence digne et indépendante, une existence qui soit choisie.  

Pour cette année, que chaque homme soit au côté de chaque femme pour sortir des  déclarations de bonne intention et agir par l’action, la lutte pour exiger une société meilleure dans laquelle exister.  

Le Témoignage de Marc BESSIERE, Ancien cadre territorial.

Qu’ajouter à ces deux plaidoyers sincères et puissants ? Peu de chose :  

– L’espèce humaine est, nous dit-on, marquée par sa conscience d’exister, sa soif de progrès et la certitude de  sa fin. Certes, depuis le paléolithique, bien des conditions de vie ont changé, portant la marque de cette conscience humaine. Sauf peut-être l’égalité des droits entre femmes et hommes ! Il serait temps maintenant de consacrer l’essentiel de notre soif de progrès à cette question qui semble avoir si peu évolué depuis des millénaires, ce serait une bonne chose …  

– Qu’a répondu en 1920 Marie CURIE, prix Nobel de chimie avec son mari Pierre CURIE, à un journaliste qui lui posait la question : « qu’est ce que cela fait d’être mariée à un prix Nobel ? ». Elle lui a répondu : « aucune idée, allez donc le demander à mon mari ! »

Il y a donc, c’est évident, le droit des femmes et le droit des hommes, comme il y a le devoir des hommes et le devoir des femmes. Droits et devoirs, les uns vis à vis des autres, en toute égalité, il serait bien temps !!

La contribution de Mahamoud TOURE, Professeur d’université, consultant en sociologie, environnement, diplomatie et communication de crise.

L’égalité entre les hommes et les femmes est un principe fondamental qui vise à garantir les mêmes droits, opportunités et traitements pour tous, indépendamment de leur genre. Cela signifie que les hommes et les femmes doivent être traités de manière équitable et avoir les mêmes chances de réussir dans tous les aspects de la vie, que ce soit sur le plan professionnel, social, politique ou familial.  

L’égalité entre les hommes et les femmes est un enjeu majeur de société. Elle contribue à promouvoir la justice, la diversité et le respect des droits de chacun. Elle permet également de lutter contre les discriminations et les inégalités de genre qui persistent encore dans de nombreux domaines.  

Pour atteindre une véritable égalité entre les hommes et les femmes, il est nécessaire de mettre en place des politiques et des actions concrètes visant à promouvoir l’égalité des chances, à lutter contre les stéréotypes de genre et à garantir le respect des droits des femmes. Il est essentiel de sensibiliser la population à l’importance de l’égalité entre les sexes et de promouvoir une culture de l’égalité dans tous les aspects de la vie quotidienne.

Sous-représentées dans les postes de direction, les femmes continuent de gagner en moyenne moins que les hommes pour un travail équivalent. En politique, les femmes subissent les mêmes limitations dans de nombreux pays. Malgré des quotas de genre et des mesures incitatives pour promouvoir la participation des femmes en politique, les progrès restent lents.  

Sur le plan social et culturel, les stéréotypes de genre et les normes sociales discriminatoires continuent de limiter les possibilités des femmes et de les cantonner dans des rôles d’accompagnement. Il est donc essentiel de promouvoir une culture de l’égalité des sexes qui valorise la diversité, le respect mutuel et l’inclusion.  

L’éducation, les médias et la société civile sont les lieux de réforme et les leviers indispensables pour lutter contre les discriminations basées sur le genre.  

En conclusion, l’égalité entre les femmes et les hommes est un principe fondamental qui doit être promu et protégé dans tous les domaines de la société. Ce principe ne peut que garantir l’enrichissement de la pensée, la diversité en politique et le progrès économique et social.  Seule une approche inclusive et collaborative permettra d’avancer sur cette question douloureuse de l’égalité depuis des siècles.

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