Dans toutes les dรฉmocraties, le journaliste a une mission cardinale : informer sans parti pris, pour permettre aux citoyens de dรฉcider en toute libertรฉ. Mais que penser lorsque certains dโentre eux sโaffichent publiquement dans une campagne rรฉfรฉrendaire, soutenant ouvertement un ยซ oui ยป ou un ยซ non ยป ?
Cette posture soulรจve une question centrale : le journaliste reste-t-il fidรจle ร son rรดle, ou devient il un militant comme les autres ?
La neutralitรฉ pour le journaliste est un principe non nรฉgociable !
Bien sรปr, dโaucun me diront que dit ainsi, cโest impossible, mais il nโest pas question dโangle de traitement ou de lโintรฉrรชt quโon a pour un sujet plus quโun autre, cโest de lโimpartialitรฉ, de la dรฉontologie mรชme du mรฉtier.
Tournons nous vers la Charte de Munich, une rรฉfรฉrence mondiale. Celle-ci dรจs ses premiรจres lignes rappelle que le journaliste doit ยซ respecter la vรฉritรฉ ยป et garantir le droit du public ร une information honnรชte. Pour mieux dire, la Fรฉdรฉration internationale des journalistes-FIJ insiste sur lโindรฉpendance vis-ร -vis des pouvoirs politiques et รฉconomiques. Ces principes ne sont pas de simples slogans : ils sont le socle mรชme de la crรฉdibilitรฉ du mรฉtier.
Un journaliste qui sโaffiche dans un camp politique brise ce pacte de confiance. Dรจs lors, il ne peut plus prรฉtendre incarner la neutralitรฉ, car il a choisi son drapeau.
Il ne sโagit pas de nier que le journaliste, comme tout citoyen, possรจde une opinion et un droit de vote. Mais exprimer ce choix dans lโintimitรฉ de lโisoloir est une chose ; lโafficher publiquement en est une autre. Car ร partir du moment oรน il se dรฉclare pour un camp, il brouille les lignes entre son rรดle de professionnel de lโinformation et celui de militant.
Et cette confusion fragilise le rapport de confiance avec son public.
Le capital le plus prรฉcieux du journaliste, cโest sa crรฉdibilitรฉ. Chaque mot, chaque analyse, chaque reportage, chaque article sera dรฉsormais lu ร travers le prisme de son engagement. Le risque est alors que son travail soit perรงu non comme une information, mais comme une propagande. Or, sans confiance du public, il nโy a pas de journalisme possible.
Certains dรฉfendront lโidรฉe dโun ยซ journalisme engagรฉ ยป, surtout dans des moments dรฉcisifs de lโhistoire nationale. Mais alors, il faut lโassumer pleinement : en choisissant de prendre parti, on sort du champ du journalisme pour entrer dans celui du militantisme. Rien ne lโinterdit, mais tout impose de clarifier la posture : on ne peut pas รชtre juge et partie.
Valable pour ceux qui sont peut-รชtre au chรดmage par la bonne grรขce de la baรฏonnette. Quโon soit informรฉ de leur rupture dโavec le mรฉtier pour รฉviter les confusions de rรดles.
Encore une fois, le rรดle du journaliste nโest pas de dire au citoyen quoi voter, mais de lui donner toutes les clรฉs pour voter en conscience. Sโafficher dans une campagne, cโest trahir cette mission.