Nos prêtres et nos marabouts savent-ils seulement ce que c’est, le stade suprême du péché ? Eh bien, je vais le leur dire si jamais ils ne le savent pas : c’est la dictature.
Se doutent-ils un instant que cette monstruosité est la somme de toutes les offenses: elle est à la fois, le vol, la calomnie, la débauche et le meurtre. Je les invite à relire le Coran et la Bible, le Talmud et la Torah et ils verront que cette maudite pratique est la chose la plus abhorrée du bon Dieu.
Ils verront que c’est pour abominer les tyrannies qu’il a inventé la religion, que c’est pour honnir les despotes qu’il a envoyé ses prophètes : Abraham contre Kedorlaomer (roi d’Elam), Moïse, contre le Pharaon, Jésus contre le duo maléfique Hérode-Ponce Pilate et Mohamed contre les rois despotiques et pervertis de La Mecque.
Faut-il rappeler aux anges-gardiens de nos églises et de nos mosquées que « Tu ne tueras point » est le premier des dix commandements ? Faut-il rappeler à nos grands muftis le verset 32 de la sourate 5: « Qui tue un être humain a tué l’humanité entière » ?
Je pose toutes ces questions puisque je n’arrive pas à comprendre leur silence coupable (je dirai même, leur complicité active) devant les atrocités commises dans ce pays depuis 1958 et qui, malheureusement, continuent encore aujourd’hui, faute de semonce et de mise en garde. Je me dis parfois que si la bande de criminels qui a kidnappé – c’est le cas de le dire !-l’État guinéen le jour-même de l’Indépendance continue plus d’un siècle après, sa sale besogne, c’est parce qu’elle se croit autorisée à le faire, aucune force morale n’ayant surgi de l’ombre pour l’en dissuader.
Ce pays en est à sa 67ème année de dictature. Un record ! Soixante-sept ans de cruauté et d’injustice, soixante-sept ans de péchés capitaux ! Le croyant, le vrai, aurait appelé ça, le règne interminable du diable. En Guinée, cela passe pour la norme:
Le crime d’État est devenu une pratique régulière, une simple méthode de gouvernement, que dis-je, un élément constitutif de nos mœurs politiques et cela ne choque personne, pas même ces messieurs en soutane et en burnous. Pervertie jusque dans la foi, notre société est devenue un bazar où l’on est obligé de mentir, de voler, de tuer, pour devenir quelqu’un et cela ne choque personne, pas même les abbés et les karamokos. Notre peuple est devenu un peuple de moutons.
Le premier chefaillon venu peut les attacher, les égorger ou les faire disparaître sans choquer personne, pas même ceux qui se disent gardiens de la vertu et de la morale. Vautrés dans le lucre et dans la lâcheté collective, les Guinéens ont perdu toute idée du bien, tout sens du sacré et cela ne choque personne, pas même ceux qui brandissent la Bible et le Coran. Plus personne pour fustiger le crime, plus personne pour soulager la veuve et l’orphelin ! Pour paraphraser Goethe, la Guinée, c’est là où les tyrans sont chez eux.
Comment peut-on, mon dieu, prêcher l’islam et le christianisme et rester indifférent à tant de geôles, à tant de sang, à tant de larmes ? Comment peut-on adorer le Christ, comment peut-on vénérer le Prophète et garder un cœur de marbre devant tant d’innocents broyés sous le double effet de la cruauté gratuite et de la folie du pouvoir ?
Toutes ces questions me poussent à en poser une autre : Guinéens, pensez-vous que prier derrière des gens qui, tous les jours que fait le bon dieu, se coltinent avec des autocrates aux mains tachées de sang, est le plus sûr moyen d’accéder au paradis ?
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