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Coupe du Monde au Qatar : quel espoir pour les équipes africaines ?

Avant chaque match de football du Cameroun, Henri Mouyebe applique de la peinture verte, rouge et jaune sur son crâne chauve et son gros ventre nu. Depuis 40 ans, il transforme sa lourde carcasse en un drapeau camerounais vivant et mobile pour soutenir son équipe.

Il apportera sa peinture, et une énorme dose d’espoir, à la Coupe du monde de cette année au Qatar. « Nous y allons en conquérants, en vainqueurs, pour jouer sept matches, jouer jusqu’à la fin du tournoi », déclare Henri Mouyebe, qui prévoit que le Cameroun ira jusqu’en finale de la Coupe du monde.

Un éternel optimisme. Malheureusement, pour Henri Mouyebe, c’est très probablement une erreur, étant donné le bilan récent du Cameroun en Coupe du monde. Les Lions indomptables n’ont remporté qu’un seul match lors des cinq dernières Coupes du monde auxquelles ils ont participé, et rien ne permet de penser qu’ils se rendront au stade Lusail le 18 décembre pour disputer le plus grand prix du football.

Dans le contexte africain, les difficultés du Cameroun sont importantes car c’est l’équipe, qui a secoué le monde du football il y a 32 ans en battant le champion en titre, l’Argentine – une équipe qui comptait Diego Maradona – lors du match d’ouverture en Italie. Presque en demi-finale, si ce n’est une défaite en prolongation contre l’Angleterre.

L’Afrique est arrivée, tout le monde le dit. Pelé a déclaré qu’un triomphe africain à la Coupe du monde était imminent. Sept Coupes du monde et plus de 30 ans plus tard, aucune équipe africaine n’est allée plus loin que le Cameroun, qui a atteint les quarts de finale. Le Cameroun ne s’en est toujours pas approché.

« Il faut être réaliste », avance l’ancien sélectionneur de la Tunisie, Youssef Zouaoui, à propos des espoirs de l’Afrique de vivre une Coupe du monde historique au Qatar avec un demi-finaliste, voire mieux, cette fois-ci. « L’ambition est légitime, mais la réalité sur le terrain est autre ».

Cette réalité pour la Tunisie qui se prépare à la Coupe du monde, soutient Zouaoui, est que les meilleurs joueurs du pays, poussés par l’économie du football mondial, jouent pour des clubs européens, ce qui l’emporte souvent sur leurs engagements envers leur pays. Ces mêmes facteurs économiques ont lentement épuisé le football national tunisien, si bien que le pays est aujourd’hui en crise financière.

Comment construire de meilleurs stades, de meilleures ligues, de meilleures équipes nationales pour répondre aux exigences d’un continent de 1,3 milliard d’habitants, où le football est le sport le plus populaire ?

Ces inconvénients de base peuvent être appliqués aux cinq équipes africaines qui vont participer à la Coupe du monde de cette année – le Sénégal, le Ghana, le Cameroun, le Maroc et la Tunisie – même s’il s’agit d’équipes uniques qui ne se définissent pas seulement par leur appartenance à l’Afrique. Le problème n’est pas seulement africain, il n’est pas nouveau non plus. Les riches clubs européens attirent également des joueurs et des centres d’intérêt d’Amérique du Sud, d’Asie et d’ailleurs, et ce depuis des années.

Mais en Afrique, la Confédération africaine de football (CAF), l’organisme qui gère le football sur le continent, est considérée comme le plus grand échec de tous

La CAF a touché le fond depuis la dernière Coupe du monde lorsque la FIFA, la principale instance dirigeante du sport, a envoyé son secrétaire général pour diriger l’organisation africaine pendant six mois en 2019, un geste sans précédent pour prendre le contrôle d’une confédération continentale indépendante. C’était nécessaire, selon la FIFA, en raison du désordre organisationnel et financier dans lequel se trouvait la CAF.

La FIFA ne s’est pas arrêtée là. L’année dernière, le président de la FIFA, Gianni Infantino, a négocié un accord pour s’assurer que son candidat favori, le milliardaire minier sud-africain Patrice Motsepe, soit élu sans opposition au poste de président de la CAF. Depuis, Motsepe est accompagné d’Infantino à presque toutes les fonctions officielles.

L’influence démesurée de la FIFA sur la CAF au cours des trois dernières années a suscité une nouvelle vague de critiques à l’égard d’un organisme qui a connu des problèmes pendant bien plus longtemps et qui a certainement besoin d’être sauvé. Mais l’intérêt d’Infantino, selon les critiques, est plus probablement les 54 votes de l’Afrique, le deuxième plus grand bloc de vote continental du football derrière l’Europe, avant l’élection présidentielle de la FIFA l’année prochaine au Rwanda.

« Le fait d’avoir 54 pays et une confédération particulière à sa disposition ne fait qu’augmenter son influence », fait ressortir l’analyste du football africain Francis Gaitho, qui n’en veut pas moins aux dirigeants du football africain qui, selon lui, sont complices.

Le processus décisionnel du football africain a maintenant été « externalisé en Europe », renchérit Gaitho, tout comme ses meilleurs talents.

Au milieu de la politique, la CAF est presque en faillite, a déclaré une perte nette de 44,6 millions de dollars l’année dernière et a, d’une manière ou d’une autre, gâché un contrat de parrainage d’un milliard de dollars sur 10 ans au début de l’influence de la FIFA en 2019, qui aurait représenté le plus gros investissement unique dans le football africain et aurait pu contribuer à résoudre la myriade de problèmes.

L’espoir demeure, principalement cette fois avec le Sénégal, avec le fer de lance Sadio Mané et une équipe qui a réussi ces dernières années à s’élever au-dessus des problèmes de l’Afrique.

Ailleurs, on appelle à l’aide. Le Ghana a organisé deux journées distinctes de prière nationale, l’une pour les chrétiens et l’autre pour les musulmans, le mois dernier, pour son équipe, qui était aussi un quart de finaliste très célébré il y a 12 ans, mais qui sera maintenant l’équipe la moins bien classée de la Coupe du monde de cette année.

À 67 ans, Henri Mouyebe est assez âgé pour se souvenir clairement du parcours magique de son pays en 1990. C’est peut-être ce qui lui a donné l’énergie nécessaire pour continuer à se peindre tout le corps, de la tête aux pieds, depuis 20 ans, sans voir le Cameroun gagner une seule fois à la Coupe du monde.

« Le souhait de tous les Africains est que des performances comme celle de 1990 deviennent normales », déclaré Jules Onana, qui a joué dans cette équipe du Cameroun lors de la Coupe du monde 1990. « Plutôt que d’être un exploit sans avenir »

africanews

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