Après le Mali, le Burkina. La France retirera ses troupes du Burkina Faso d’ici « un mois » alors que la junte a dénoncé les accords de défense liant les deux pays, nouveau recul de l’influence de Paris au Sahel.
« Mardi (…) nous avons reçu formellement la dénonciation, par le gouvernement burkinabè, de l’accord de 2018 relatif au statut des forces françaises présentes dans ce pays. Conformément aux termes de l’accord, la dénonciation prend effet un mois après la réception de la notification écrite », a déclaré à l’AFP le ministère français des Affaires étrangères.
Traoré inquiet du sort des civils ciblés par les djihadistes https://t.co/RiOlN7Z0jZ
— Guinéesouverain.com (@GuineeSouverain) January 19, 2023
La France respectera « les termes de cet accord en donnant suite à cette demande ». Sollicitées par l’AFP, les autorités burkinabè n’étaient pas immédiatement disponibles mercredi pour réagir.
Le Burkina Faso héberge actuellement un contingent de près de 400 forces spéciales françaises, la force Sabre. Ces dernières auront quitté le pays « d’ici fin février » et le retrait de tous les matériels devrait être achevé « fin avril », a affirmé à l’AFP une source proche du dossier.
Selon des sources concordantes, l’option privilégiée serait alors de redéployer ces militaires d’élite au Niger voisin, qui accueille près de 2 000 personnels français.
Le gouvernement burkinabè avait assuré lundi avoir demandé le départ des militaires français dans un délai d’un mois, sans pour autant vouloir rompre diplomatiquement avec Paris. Mais la France avait répondu attendre des clarifications de la part du président de transition Ibrahim Traoré.
Depuis leur arrivée au pouvoir en septembre à la faveur d’un putsch, le capitaine Traoré et son gouvernement ont manifesté leur volonté de diversifier leurs partenariats, notamment en matière de lutte contre le djihadisme, alors que le Burkina s’enfonce depuis 2015 dans une spirale de violences.
Les nouvelles autorités ont parallèlement engagé un rapprochement avec la Russie. Le Premier ministre burkinabè a fait une discrète visite à Moscou en décembre et avait déclaré il y a deux semaines qu’un partenariat avec la Russie était « un choix de raison ».
La France est contestée depuis plusieurs mois au Burkina, alors que la présence militaire de l’ancienne puissance coloniale n’a pas permis notamment d’enrayer les attaques des groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique (EI) dans ce pays parmi les plus pauvres au monde.
Les autorités burkinabè n’ont pas sollicité l’aide militaire de leur partenaire depuis juillet 2022, selon l’état-major français. En décembre, la junte avait demandé à Paris le remplacement de son ambassadeur, Luc Hallade, visé notamment pour avoir fait état de la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays.
Lundi, le porte-parole du gouvernement, Jean-Emmanuel Ouédraogo, a indiqué que celui-ci avait « reçu toutes les assurances sur le fait que les autorités françaises vont accéder à cette requête dès cette semaine ». Mais de source diplomatique, son sort n’était pas encore scellé.
Le précédent malien est dans toutes les têtes. Après neuf ans de présence, les militaires français ont achevé leur retrait du pays en août, poussés dehors par une junte hostile qui a fait appel à la sulfureuse société paramilitaire russe Wagner.
En coulisses, la junte burkinabè assure à la France qu’elle ne compte pas s’attacher les services de Wagner, dont une équipe de liaison est venue prospecter au Burkina, riche en ressources minières, selon plusieurs sources françaises. Mais les services de garde prétorienne proposés par les mercenaires russes pourraient finir par séduire les militaires au pouvoir.
Le président français Emmanuel Macron a lancé une réflexion pour repenser les partenariats militaires sur le continent africain, qui devront coller aux demandes spécifiques des pays et s’appuyer sur des dispositifs moins visibles. De premières conclusions devraient être tirées « dans les prochaines semaines », de source gouvernementale.
Quelque 3 000 militaires français sont toujours déployés au Sahel, entre Niger, Tchad et Burkina.
AFP